Ce module est une ressource pour les enseignants 

 

Introduction

 

La discrimination à l'égard des femmes, fondée sur des stéréotypes sexistes, des préjugés, des normes culturelles néfastes et patriarcales, et la violence sexiste qui touche les femmes en particulier, ont une incidence négative sur leur capacité à avoir accès à la justice sur un pied d'égalité avec les hommes. (Comité sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes, Recommandation générale n° 33, paragraphe 8).

Les termes utilisés ici par la Convention des Nations Unies sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes (Comité CEDEF) sont clairs. Du fait de leur genre, les femmes font face à des difficultés disproportionnées pour avoir accès à la justice. Cette évaluation de l'accès différencié des femmes à la justice a été présentée en 2015 comme le point de vue de l'ensemble des États membres des Nations Unies. Elle repose toutefois sur des analyses depuis longtemps adoptées dans les recherches juridiques féministes. Depuis des décennies, des chercheurs et des chercheuses, des juristes, ainsi que des personnes en contact avec les systèmes de justice pénale, ont partagé leur conclusion que les services de police, les systèmes juridiques, judiciaires et pénaux répondent mieux aux besoins des hommes (Walklate, 2004). Bien que l'existence d'importantes différences entre les systèmes juridiques à travers le monde  interdise les généralisations sur le degré auquel le droit est fonction du genre, , les recherches juridiques féministes du monde entier soutiennent que les femmes et les filles sont lésées par des préjugés genrés et des omissions dans les textes de loi (Smart, 2002). 

Le fait que tout le monde ait une identité de genre et que tout le monde ait une orientation sexuelle signifie que les femmes et les filles ne sont pas les seules confrontées à une discrimination fondée sur le genre. En se basant sur la compréhension contemporaine de l'orientation sexuelle, de l'identité ou de l'expression de genre, et des caractéristiques sexuelles, ce module vise également à attirer l'attention des étudiantes et des étudiants sur les effets négatifs que des préjugés et pratiques  genrés peuvent avoir sur les personnes qui se déclarent ou sont perçues  comme des personnes ayant une orientation sexuelle, une identité ou une expression de genre et des caractéristiques sexuelles différentes (souvent définies par l'acronyme non exhaustif LGBTI : lesbienne, gay, bisexuel, transgenre, intersexué). Ce module examine les principales façons dont les préjugés genrés influencent le fonctionnement du système de justice pénale, et leurs implications pour ce qui est de faciliter ou d’entraver l’accès à la justice des femmes, des filles, ainsi que des personnes LGBTI. Ce faisant, ce module met en lumière l’impact des préjugés et pratiques genrés non seulement sur les victimes, les plaignants et les plaignantes, mais aussi sur les témoins, les personnes accusées/prévenues ou emprisonnées, et ce à tous les niveaux du système de justice pénale, y compris : pendant les phases de signalement/dépôt de plainte et d'enquête, l'instruction, le procès, le prononcé de la peine, l'application de la peine et la réinsertion. 

Globalement, en Afrique occidentale, les institutions politiques abordent la question du genre davantage dans une perspective de promotion de l’égalité entre l’homme et la femme (paradigme binaire) que sur le fondement de la nécessité  d’une approche reposant sur une libre orientation sexuelle, identité et expression de genre.  La Politique Nationale Genre du Mali par exemple s’inscrit dans le respect des «  valeurs socioculturelles qui forgent l'identité et la fierté du Peuple malien. Elle vient plutôt réaffirmer et renforcer les valeurs positives et respectueuses des droits des femmes et des hommes qui se traduisent dans les pratiques familiales, sociales et communautaires. Elle réaffirme le rôle indéniable de la famille comme vecteur de transmission des valeurs culturelles et égalitaires ». Dans la même logique, afin de rester ancré   dans les valeurs de base de son pays, le président sénégalais affirmait que « le Sénégal est un pays tolérant qui ne fait pas de discrimination en termes de traitement sur les droits (…) mais qui n’est pas prêt à dépénaliser l’homosexualité. C’est l’option du Sénégal pour le moment. Cela ne veut pas dire que [que les sénégalais soient] homophobes. Mais il faut que la société absorbe, prenne le temps de traiter ces questions sans qu’il y ait pression ». Des études démontrent pourtant que l’homosexualité « comme orientation sexuelle et les homosexualités comme praxis dynamiques dans l’univers des sexualités » n’étaient pas étrangères aux cultures des sociétés africaines « pré-civilisatrices ». Bien au contraire la recherche révèle une société africaine précoloniale tolérante vis-à-vis  des minorités sexuelles et dont la tendance à l’intolérance prend son origine  avec l'établissement de lois imposées par la colonisation.

Le module est divisé en quatre thèmes :

  • Thème no. 1 : Discrimination fondée sur le genre et femmes en conflit avec la loi
  • Thème no. 2 : Vulnérabilités des filles en conflit avec la loi
  • Thème no. 3 : Discrimination et violence à l’encontre des personnes qui se déclarent ou sont perçues comme des personnes LGBTI 
  • Thème no. 4 : Diversité en termes de genre du personnel dans le système de justice pénale
 

Objectifs d'apprentissage

  • Évaluer de manière critique les différentes façons dont les problèmes liés au genre surviennent aux différentes étapes du système de justice pénale.
  • Décrire l’impact des pratiques, structures et règles et préjugés genrés sur les plaignantes et les plaignants, les témoins, les personnes accusées/prévenues ou emprisonnées dans le contexte du système de justice pénale. 
  • Définir les risques accrus pour les personnes confrontées à la discrimination et à la violence en raison de leur orientation sexuelle, de leur identité et expression de genre, ainsi que de leurs caractéristiques sexuelles au cours d’une procédure pénale, ainsi que les risques accrus de préjudice disproportionné du fait de leur interaction avec le système de justice pénale. Expliquer comment le « genre » n'est pas un concept synonyme de femmes, et que les rôles et caractéristiques attribués à un genre sont des construits sociaux, ainsi  que des motifs potentiels de discrimination et de violence à l’égard de tous (femmes, hommes, et personnes qui se déclarent d'un troisième genre, de genre neutre, ou fluide). 
  • Reconnaître les principales normes internationales protégeant les droits des femmes, des filles et des personnes LGBTI dans le système de justice pénale. 
  • Expliquer les questions clés soulevées par la diversité de genre du personnel dans le système de justice pénale.
 
Section suivante :  Termes clés
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