Renforcer l'intégrité judiciaire grâce à des systèmes de transparence financière pour les juges

Programme mondial de la Déclaration de Doha27 février 2017 - Il y a tout juste une décennie, la suggestion faite aux officiers de justice d'introduire des règles et des obligations pour déclarer leur patrimoine, autres intérêts et activités dans le but de préserver l'intégrité judiciaire et protéger des cas de corruption fut accueillie avec un profond scepticisme. Même parmi ceux exerçant dans des juridictions où les systèmes de déclaration de revenus et de patrimoine sont appliqués également aux juges, un certain nombre d'entre eux ne manquaient pas l'occasion de qualifier ces systèmes d'aussi intrusifs qu'inutiles dans la détection d'enrichissement illégaux ou la prévention de conflits d'intérêts.

Par conséquent, il n'est pas surprenant que ni les Principes de Bangalore sur la déontologie judiciaire développés en 2003 et approuvés par le Conseil économique et social des Nations unies en 2006, ni les mesures pour leur implantation efficace qui furent développée par le Groupe pour l'intégrité de la justice en 2010 ne firent référence aux systèmes de transparence.

La Convention des Nations unies contre la corruption contient plusieurs propositions qui soulignent l'importance des mesures et des systèmes requérant aux agents de la fonction publique de déclarer leurs activités, emplois, investissements, biens et profits concomitants dont il pourrait résulter un conflit d'intérêt . En raison de la large définition  d'« agent de la fonction publique » adoptée par la Convention, ces dispositions s'appliquent également aux officiers de justice. Le guide d'implantation et d'évaluation du cadre d'évaluation pour l'article 11 publié par l'ONUDC en 2015 fournit des conseils supplémentaires pour une mise en place optimale de ces systèmes de transparence financière. 

Il n'est donc pas surprenant que cette question ait gagné du terrain dans de nombreuses juridictions. Dans les publications récentes de la Banque mondiale - Initiative de recouvrement d'avoirs volés - et de l'ONUDC - Obtenir la vision globale des agents de la fonction publique : Guide de recommandations pour une transparence financière efficace -, de nouvelles données sont présentées et indiquent que dans plus de la moitié des 161 pays couverts par l'étude, les juges et procureurs sont tenus de déclarer leurs revenus, leurs biens et autres intérêts, et leurs activités. Dans le cadre de la Cour Suprême de Justice, cela s'applique à presque 60% des pays.

Les juges eux-mêmes ne fuient plus le débat. En 2016, la première étude de la Commission de l'Association internationale des juges sur les mesures pour défendre l'intégrité et lutter contre la corruption dans le système judiciaire a encouragé « la déclaration et l'évitement des conflits d'intérêts, ou la déclaration par les juges de tout lien avec des intérêts publiques pouvant entrainer un conflit réel ou apparent ». L'existence de registres publiques et non-publiques des biens et des revenus dans un nombre significatif de pays est en outre spécifiquement saluée et reconnue comme « une bonne mesure pour prévenir la corruption ». La Commission a souligné dans le même temps le fait que « de telles mesures ne sont  convenables que lorsque des circonstances précises les requièrent et que ces mesures sont proportionnelles à la situation données. »

Il s'agit l'opportunité concrète de faire progresser le débat, de partager les expériences et d'apprendre des juridictions qui ont mis en place des systèmes de transparence financière ou similaires pour leurs juges, incluant ceux soumis à ces dispositions, et si et à quelles conditions les informations contenues dans les dispositifs sont rendues accessibles aux justiciables, aux avocats et autres parties prenantes. Le réseau mondial pour l'intégrité judiciaire, une initiative bientôt lancée par l'ONUDC avec le soutien financier du Qatar, fournira une plateforme unique pour les juges à travers le monde pour s'échanger les bonnes pratiques, se soutenir et se conseiller, et pour développer des outils et de la documentation servant à guider les systèmes judiciaires dans leurs efforts pour renforcer l'intégrité et la prévention de la corruption. 

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Programme mondial pour la mise en oeuvre de la Déclaration de Doha