La Norvège intensifie la lutte contre la déforestation illégale en s'associant avec l'ONU et INTERPOL

La Norvège intensifie la lutte contre la déforestation illégale en s'associant avec l'ONU et INTERPOL. Image ©EIA27 juin 2018 - Le gouvernement norvégien a annoncé un engagement financier à hauteur de 15 millions d'euros (145 millions de NOK) pour soutenir un partenariat entre INTERPOL, l'Office des Nations Unies contre la drogue et le crime (ONUDC) et le Centre norvégien d'analyses globales afin de lutter contre la déforestation illégale.

Enrayer et inverser la dégradation des terres et la déforestation tropicale pourraient fournir jusqu'à 30% de la solution au changement climatique.

Les principaux pays de la forêt pluviale ont estimé que les taux d'exploitation illégale se situaient entre 50 et 85%. Ce nombre élevé découle des multiples occasions de violer la loi tout au long du processus de déforestation - des pots-de-vin à la corruption en passant par de fausses licences, une conversion illégale des terres, l'exportation illégale de bois et le camouflage des paradis fiscaux. Les entreprises opérant illégalement, les groupes criminels organisés et même les cartels détruisent les forêts de la planète. La déforestation a d'immenses impacts non seulement sur le changement climatique, mais aussi sur les peuples autochtones vivant dans les forêts tropicales ainsi que sur la biodiversité unique des forêts tropicales.  

À cause de la complexité des activités criminelles liées à la déforestation illégale, une approche globale de l'application de la loi est nécessaire. C'est pourquoi, l'ONUDC, INTERPOL et le Centre norvégien d'analyses globales sont en train de développer une stratégie de collaboration intitulée : « Programme d'assistance à l'application de la loi pour réduire la déforestation tropicale » (ou programme LEAP en anglais). Le programme soutiendra différentes organisations des forces de l'ordre dans leurs efforts communs afin de lutter contre la déforestation illégale et les crimes qui lui sont associés.

« Il est primordial d'intensifier la lutte contre les crimes forestiers pour réaliser les objectifs climatiques nationaux, ceux de l'Accord de Paris et les objectifs de développement durable.  En collaboration avec des pays partenaires ambitieux, nous ne permettrons plus aux criminels de détruire massivement les forêts tropicales. Nous intensifierons les efforts pour mettre fin à ce crime grâce à ce vaste soutien. » a déclaré Ola Elvestuen, ministre norvégien du climat et de l'environnement.

L'exploitation illégale alimente également les conflits et devient une nouvelle activité criminelle « sûre » pour les cartels de la drogue et les groupes activistes à la recherche de sources de revenus alternatives. Une enquête récente d'INTERPOL a conclu que 84% des pays, ayant répondu, ont signalé une convergence des crimes contre l'environnement avec d'autres crimes tels que la corruption, le trafic de drogue et la cybercriminalité. Plus de 80% des pays interrogés signalent également que la lutte contre les crimes environnementaux devient une priorité nationale. Le programme renforcera donc les efforts de l'ONU et d'INTERPOL dans la lutte contre les crimes dans les conflits et la criminalité organisée de manière plus générale. 

« La criminalité environnementale a explosé ces dernières années, générant des profits illicites se chiffrant en milliards pour les criminels également impliqués dans des affaires de corruption, de blanchiment d'argent et dans d'autres formes de trafics. La protection des précieuses ressources de l'environnement est notre responsabilité collective envers les générations futures.
Il est essentiel que des mesures décisives soient prises, et ce projet constitue donc une plate-forme efficace pour unir nos efforts », a déclaré le Secrétaire général d'INTERPOL, Jürgen Stock, qui a souligné le succès récent de l'opération Thunderstorm.

Les protagonistes ont bon espoir de voir l'initiative faire une réelle différence, comme on l'a déjà vu dans certains pays. Actuellement, l'exemple le plus significatif de réduction de la déforestation dans le monde a été la réduction de 76% de la déforestation au Brésil au cours des trois dernières décennies. Les opérations conjointes menées par la police fédérale au Brésil ont été un pilier stratégique afin d'atteindre ce résultat remarquable.

« L'ONUDC soutient la capacité des pays à lutter contre le crime organisé transnational sous toutes ses formes en fournissant conseils, encadrement, outils et formation à toutes les étapes du système de justice pénale et cela depuis les saisies d'importations et d'exportations illicites aux enquêtes, poursuites et jugements, en passant par la confiscation des avoirs criminels », a déclaré le directeur exécutif de l'ONUDC, Yury Fedotov. « Nous mettons à disposition un solide réseau de professionnels et nous aidons ainsi les pays à sécuriser leurs cargaisons mondiales et à priver les groupes criminels de l'argent obtenu illégalement. »

La déforestation illégale est sans aucun doute une menace aux proportions mondiales. Ces dernières années, les opérations d'INTERPOL ont permis la saisie de plus de 1 million de mètres cubes de bois illicite (d'une valeur de plus de 1,5 milliard de dollars EU) en Afrique, en Asie et en Amérique latine. La formation d'INTERPOL et de l'ONUDC sur les cellules de renseignement financier a permis de saisir des millions de dollars d'actifs et de les réintégrer dans les budgets de l'État. Les rapports de Centre norvégien, par l'intermédiaire du Conseil de sécurité des Nations Unies ont révélé que les profits du crime organisé pillant des ressources naturelles telles que le bois, le charbon et l'or, équivalaient à 770 millions de dollars par an dans certains des pays les plus pauvres du monde. Cela a contribué à stimuler l'appel à une action collective pour renforcer l'application des mesures visant à prévenir la criminalité liée au bois et à lutter contre les criminels qui abattent illégalement les forêts du monde.

Les trois institutions travailleront ensemble pour partager expertises, réseaux et efforts afin de soutenir conjointement les pays d'Amérique Latine et d'Asie du Sud-Est. Cela inclut le renforcement de leurs capacités, la création de groupes de travail nationaux pour être à la pointe en matière de répression des fraudes, les enquêtes, les poursuites et les efforts douaniers nécessaires afin d'empêcher la déforestation illégale, de traquer les expéditions illicites et de saisir les avoirs.

Ce travail ira également de pair avec des efforts plus larges consacrés à la lutte contre la déforestation et à la garantie d'un développement durable grâce à de bonnes pratiques et à des accords de partenariat.

« Lorsque nous savons que les actions criminelles et parfois même les cartels sont derrière 50-90% de la déforestation tropicale, nous savons qu'ils ne vont pas disparaître volontairement. » a déclaré Christian Nellemann, directeur au centre norvégien. « Certains de ces groupes ont déjà été impliqués dans le trafic de drogues ou ont combattu dans des conflits et certains constitue des organisations opérant parmi les paradis fiscaux par le biais de sociétés écrans et sapent également les industries forestières durables dans les pays forestiers tropicaux et dans le monde. »

Informations complémentaires :

Le travail de l'ONUDC sur la criminalité liée aux espèces sauvages et aux forêts